Nouvelles de la Charte des Jardins
No 7, automne 2014
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LES GLANDS Je me croyais chêne, je n'étais qu'un gland. (Frédéric Dard, 1921-2000)
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Fruits du chêne, les glands sont riches en amidon et se conservent longtemps. Ils nourrissent ainsi quantité d'animaux de la petite faune des parcs et jardins, tel le bien nommé Geai des chênes. En automne, l'oiseau cache des glands dans le terrain pour avoir de quoi manger pour l'hiver. L'écureuil et le mulot en font aussi des réserves. Quant au beau pigeon ramier, il les cherche dans les lisières pour les avaler tout ronds.
Mais pour produire des glands, nos grands chênes (sessile ou pédonculé) doivent atteindre une cinquantaine d'années. Et les glandées abondantes ont lieu seulement tous les 5 à 10 ans – c'est dire que les glands sont vraiment un cadeau du ciel.
Lorsqu'on veut se débarrasser des glands tombés sur la pelouse, plutôt que de les mettre avec les déchets verts, il est judicieux de les rassembler dans un coin du terrain. Certes, il faudra arracher les petits chênes qui ne manqueront pas de germer, mais c'est plus facile à faire s'ils sont tous au même endroit et si on s'y prend tôt. La Charte des Jardins recommande d'ailleurs de laisser sur son terrain une partie de ce qui tombe des arbres: feuilles, graines, branchettes... afin de permettre aux animaux de se nourrir, de se cacher et de bâtir leurs nids.
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Sauterelles
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Les sauterelles préfèrent les arbres et les buissons à la prairie. Elles ont de très longues antennes et de longues pattes; et elles sont plutôt carnivores qu'herbivores. C'est ce qui les distingue des criquets, aux antennes courtes et qui préfèrent la vie dans l'herbe. Côté musique, le mâle sauterelle produit ses stridulations en frottant deux de ses quatre ailes l'une contre l'autre – alors que le mâle criquet frotte ses grands fémurs sur ses ailes.
Avec les oiseaux et les autres orthoptères musiciens (courtillères, criquets, grillons), les sauterelles contribuent à l'ambiance sonore des parcs et des jardins jusqu'aux premiers froids. Plusieurs espèces – toutes inoffensives – peuvent vivre en compagnie des êtres humains, si on évite les pesticides et qu'on leur laisse des coins de prairie non tondus et non piétinés.
En effet, comme les criquets, la plupart des sauterelles pondent leurs oeufs peu profondément dans le sol à la fin de l'été et en automne: les pontes sont détruites sous les roues des tondeuses et sous le poids de nos pas. Ainsi, leurs meilleures chances de survie en milieu urbain sont les talus et les coins peu accessibles – à condition que la végétation soit variée, et que les prairies soient tondues en douceur, pas trop bas, et tard dans l'année.
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Tournesol-mangeoire
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Le tournesol (Helianthus annuus) est originaire d'Amérique du Nord. Doté d'une racine en pivot qui lui permet de chercher l'eau profondément, il pousse facilement, sans engrais, et résiste aux maladies. Il en existe toutes sortes de variétés, sélectionnées pour leurs graines très riches en huile, ou pour leurs effets décoratifs: taille et fleur géantes, sommité formant un bouquet d'une douzaine de fleurs, couleur allant du jaune pâle jusqu'au pourpre...
Dans un jardin, un tournesol qui sèche sur pied est une aubaine pour de nombreux oiseaux, tel le Chardonneret. On fera donc bien de laisser la plante séchée sur place tant qu'elle peut offrir des graines. Et si on veut voir les oiseaux se régaler, on se souviendra que, si le tournesol en croissance suit les mouvements du soleil, sa fleur se fixe finalement dans la direction Est/Sud-Est.
Par contre, on se méfiera de son cousin le Topinambour (Helianthus tuberosus), planté soit pour ses tubercules comestibles, soit pour ses belles fleurs jaunes qui fleurissent en septembre. Le topinambour est une plante exotique envahissante: il s’échappe des jardins et peut former des colonies importantes le long des cours d'eau, en se propageant par ses racines et ses tubercules. Il vaut donc mieux éviter de jeter des topinambours arrachés sur un compost (à donner à l'incinération). On y pensera aussi lorsqu'on déplace de la terre, surtout à proximité d'un cours d'eau.
• Le Topinambour (pdf)
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Compost-restaurant
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En Suisse, le tri des déchets ménagers fonctionne en général bien – même s'il y a encore des efforts à faire, notamment au niveau de la récupération des déchets de cuisine. Ces déchets organiques sont malvenus dans les poubelles parce qu'ils contiennent beaucoup d'eau (ils brûlent mal dans les usines d'incinération), et parce qu'ils peuvent produire un excellent compost en se dégradant avec les déchets de jardin.
Il faut considérer le compost comme un mélange de terreau et d'engrais. Et il y a trois avantages à le produire sur son terrain. On évite le transport de déchets organiques. On maîtrise la qualité de ce qu'on va étaler au pied de ses plantes d'ornement ou de ses légumes. Et on peut offrir une source de nourriture aux oiseaux qui restent en hiver.
Mésanges, merles, rouges-gorges, troglodytes... tous profitent des petits invertébrés qui habitent le compost et participent à la dégradation des déchets organiques. En hiver, le compost peut même devenir un élément très important de la survie de la petite faune des jardins. Suivant le type d'installation choisie, on peut d'ailleurs en faciliter l'accès aux hérissons et aux musaraignes, tout en empêchant les renards et les corneilles d'y farfouiller.
• L'art du compostage
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De la nature sur le toit
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La Charte des Jardins peut aussi s'appliquer sur le toit. En milieu urbain, les toitures végétalisées – avec des espèces indigènes sauvages – offrent à la petite faune de nouveaux espaces de vie qui peuvent s'avérer très riches en biodiversité. Or, la végétalisation d'un toit plat demande à la fois de bonnes connaissances en technique du bâtiment et en horticulture. Il faut donc saluer l'excellente brochure "tout public" éditée par le Service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne: "Toitures végétalisées, guide de recommandations – Pourquoi et comment accueillir la nature sur son toit."
Techniques d'étanchéité, coûts, entretien, choix du substrat et des espèces végétales: l'essentiel est dit en 24 pages bien illustrées par des photos et des dessins. À télécharger gratuitement, et à consulter même si on n'a pas de toit plat au-dessus de la tête.
• Toitures végétalisées
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Vie de la Charte
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Rue des Charmettes (NE)
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Rares sont encore les habitats collectifs ayant signé la Charte des Jardins. Il y en a un qui mérite d'être cité à Neuchâtel: à la rue des Charmettes, un long immeuble de 24 logements vit une renaturation qui ravit ses habitant. Avec l'accord de la gérance, Georges Gobat, qui s'occupe de l'entretien extérieur, a déjà arraché une trentaine de mètres de la vieille haie de thuyas pour les remplacer par des arbustes indigènes – il y a encore une centaine de mètres à faire. Il a bâti un mur en pierres sèches, organisé un coin de plantes aromatiques et remplacé le gazon sans vie par de la prairie sèche et des nouveaux massifs de plantes sauvages. Tous les végétaux ont été achetés au Jardin botanique de Neuchâtel, également signataire de la Charte des Jardins.
Le jardinier a aussi créé un coin-potager: malgré l'été maussade, chaque logement a pu recevoir son kilo de tomates. "La transformation de notre parcelle fait plaisir à tous", déclare le jardinier. "Et elle fait des émules dans le quartier."
• Aménagements naturels en accord avec la Charte
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Porrentruy (JU)
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La ville de Porrentruy, deuxième du canton du Jura par sa population, s'étend sur 1476 hectares. Son nouveau Règlement communal sur les constructions (RCC) définit l'usage du sol et établit les règles de construction. Elle se réfère désormais à la Charte des Jardins qui figure dans ses documents annexes. Voici d'ailleurs, in extenso, deux de ses articles concernant directement la biodiversité:
Art. 31 • En règle générale, les nouvelles plantations d'arbres, aussi bien en milieu urbain qu'en milieu naturel, se composent d'essences locales afin de conserver l'identité des lieux.
Art. 32 • Pour l'aménagement et l'entretien des espaces publics communaux, les autorités municipales mettent en œuvre, à titre d'exemplarité, les principes de la biodiversité et tendent à la mise en application de la Charte des jardins jointe en annexe au présent règlement. Pour l'aménagement et l'entretien des jardins et des alentours des bâtiments privés, les dispositions préconisées à l'alinéa ci-dessus sont promues.
• Porrentruy (JU)
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Céligny (GE)
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La commune de Céligny (GE) débute la promotion d'un nouveau quartier d'habitation, axé sur la convivialité et la mixité générationnelle. À terme, il sera composé de quatre immeubles totalisant 28 logements à louer et 24 à vendre en PPE. Le projet respecte la végétation existante, avec ses cordons de chênes riches en biodiversité et ses bosquets isolés. Les toitures végétalisées (prairie maigre) freineront les eaux de pluie qui seront ensuite conduites dans des dépressions du terrain pour former des mares temporaires. Les logements situés au rez-de-chaussée bénéficieront d'un jardin. Les espaces extérieurs seront gérés selon les principes de la Charte des Jardins.
Les candidats à la location ou à l'achat de ses logement sont conviés à signer une charte d'intention dans laquelle ils s'engagent à respecter le caractère "développement durable" de ce nouveau quartier: mobilité douce, tri des déchets, économie d'énergie, etc. mais aussi la convivialité de la vie villageoise et l'esprit de la Charte des Jardins.
• Les Grands-Chênes
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SOS hérissons (GE)
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Le hérisson est un véritable ambassadeur de la biodiversité en milieu urbain. Mais lorsqu'un hérisson vous rend visite en plein jour, c'est généralement signe qu'il ne se porte pas bien. Et il y a bien des chances que l'origine de son malaise soit la faim: les espaces verts et les jardins des environs ne lui offrent pas assez de coins sauvages où dénicher des vers, des insectes et des mollusques.
À Vernier (GE), dans son centre de soins SOS-Hérissons agréé par les gardes-faunes, Christina Meissner accueille les hérissons affaiblis ou blessés. Elle fait aussi la promotion de la Charte des Jardins pour inciter la personne qui lui amène un pensionnaire à "soigner" aussi son jardin en attendant que l'animal y soit relâché après avoir repris des forces: laisser des coins d'herbe non tondus, faire un tas de branches et de feuilles mortes, renoncer aux pesticides, créer des passages avec les parcelles voisines...
Remis à neuf durant l'été, le centre de soins reçoit environ 150 hérissons par an, dont plus des trois quarts survivent et peuvent être relâchés là où ils ont été trouvés. En juin dernier, 80 élèves des classes primaires de la commune ont même visité les lieux, et découvert les bonnes pratiques de la Charte des Jardins favorables aux pensionnaires du centre.
• SOS-Hérissons • Pro-Igel
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Agenda
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3 octobre • Pépinières genevoises
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C'est une journée réservée aux professionnels: le vendredi 3 octobre à Bernex (GE), de 11h à 15h, les Pépinières genevoises ouvrent leurs portes pour présenter leurs serres et leurs plantations. Partenaire de la Charte des Jardins dans la vente de plantes indigènes, cette entreprise est l'une des rares du pays qui multiplie une grande partie des végétaux qu'elle élève. Par semis pour les plantes vivaces indigènes, et par bouturage pour les arbres et les arbustes afin d'assurer leur origine locale. Elle greffe aussi ses arbres fruitiers – surtout des variétés locales – avant de les former en haute-tige.
La demande de plantes indigènes sauvages et d'arbres fruitiers anciens est en forte hausse – et c'est tant mieux. Mais, pour des raisons de coûts, beaucoup de plantes et de semis en vente proviennent de régions d'Europe où la main d'oeuvre est bon marché: elles ne sont donc pas vraiment "indigènes". Or, il faut se rappeler que la variété génétique est une composante importante de la biodiversité locale. La journée portes-ouvertes a aussi pour but de faire passer ce message aux professionnels.
• Pépinières genevoises
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11 octobre • Ollon (VD)
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On vous a déjà parlé du Collège de Perrosalle, à Ollon (VD), dont le périmètre a été réaménagé par les élèves en collaboration avec le Service des forêts de la commune, dans le cadre d'un projet imaginé par un groupe de citoyens: plantation d'arbustes indigènes, création de prairie sauvage, construction en pierres sèches pour les lézards, tas de bois... une grande métamorphose qui a permis de (re)mettre la nature directement sous les fenêtres de l'école et d'appliquer toutes les bonnes pratiques de la Charte des Jardins. Une aubaine pour les cours de sciences naturelles.
Débutée en automne dernier, cette renaturation fera l'objet d'une inauguration officielle le samedi 11 octobre, avec enseignants, élèves et leurs parents, citoyens et autorités.
• Ollon
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